TABLE RONDE

TABLE RONDE

Dimanche 2 décembre 2001

De la reproduction et des transferts
avec
Julie Heintz (tampons Fluxus)
Yung-Hao Liu (tampons Orient/Occident)
Sophie Nagiscarde (l’art du tampon)
Michel Weemans (l’irreproductible)
Gereon Inger
Jean Claude Mouton

Michel Weemans
Il y a un aspect ludique ui est passionnant et qui n’empêche pas le fait qu’il y ait questions remarquables dans ce domaine. La question du lien entre tampon et reproduction (ref. du catalogue « Tampons »), la forme du tampon que nous connaissons est né en 1839 coïncide assez bien avec l’arrivée du caoutchouc et l’apparition de la photographie, avec l’arrivée de cette expression de Benjamin « une ère de la reproductibilité »,tout un tas d’aspect et de phénomènes qui on fait que notre relation aux œuvres mais aussi la nature même des œuvres a été transformée à partir de ce moment, d’une reproductibilité technique. C’est donc intéressant cette conjonction entre l’apparition du tampon et cette ère de la reproduction. Beaucoup d’artistes qui se sont qui se sont posés la question de la reproduction, qui se sont posés la problématique, qui l’ont déployés sous des formes très variées, à la fois à la forme d’œuvres multiples opposées à l’objet unique, original, et donc ça met en jeu des questions de l’œuvre en tant qu’objet marchand, ça met en question de notions d’auteurs etc, mais aussi du point de vue de la réception ça pose tout un tas de questions quand à tout un tas d’effet de déformations, de transfiguration de l’œuvre à travers ces reproductions et de l’œuvre en tant qu’elle est prise dans des réseaux de circulation de diffusion ou est soumise à des effets de transformation. Donc ses questions là qui sont celles de la reproductibilité, de la reproduction elles sont aussi les questions que posent le tampon et c’est pas étonnant si beaucoup des artistes qui sont associées à cette problématique de la reproduction ont utilisé le tampon de manière accidentelle ou ponctuelle par exemple quand Claude Viala utilise le tampon pour répéter sa fameuse forme, ou de manière beaucoup plus suivie comme Warhol et comment le tampon apparaît dès 49 jusqu’au début des années 60 et ça anticipe complètement toute son œuvre sérigraphique.

Sophie Nagiscarde
Chez Warhol, il y avait une volonté en fait d’effacer le trait de la main. Même dans son travail publicitaire il avait commencé à utiliser le techniques proches de celles du tampon puisqu’il travaillait sur des feuilles de plastique et ensuite pour tous ses travaux publicitaires où l’on voit des décors (décors de grands magasins par exemple) il appliquait une feuille en plastique entre la main et le papier, il ne sortait que ce qu’il y avait dessous et il n’y avait plus le trait de la main. Ensuite il a commencé ses premiers boulots en creusant soit des gommes soit en faisant reproduire des photos de stars sur tampons (procédé qu’emploi par Jean Claude Mouton). Pour moi Warhol est un des artistes les plus importants de ce siècle car il a posé après la guerre les problématiques essentielles de la reproduction de la société de masse, du multiple et de l’œuvre originaleet de ce qui est l’oeuvre. Et dans le tampon, il y a une notion qui me parait essentielle par rapport à l’objet lui même c’est de savoir qu’est-ce qui est l’œuvre, est ce que c’est l’objet ou est ce que c’est l’empreinte.

Michel Weemans
Pour ce qui est de l’objet tampon, c’est aussi, cet objet qui est né au 19eme siècle que chaque génération d’artistes réinvesti à sa façon, dans des nouveaux contextes, selon l’évolution des technologies mais le tampon s’est aussi ce petit objet paradoxal qui oscille entre deux univers : un monde ludique et un univers bureaucratique et ça aussi c’est un aspect important auquel les artistes se sont confrontés sous le biais du détournement ou de la parodie ou bien sous la forme que Benjamin Bucco appelait « l’esthétique administrative » pour définir l’art conceptuel, c’est Yung Hao Liu et Julie Heintz qui pourront décrire de manière plus précise comment le tampon est en parfaite correspondance avec les enjeux qui sont ceux des artistes du travail conceptuel de Fluxus ou Beuys. Le tampon c’est un objet qui semble avoir traversé l’art du 20 eme siècle et qui continue et qui chaque fois est réinvestit comme si on lui découvrait une nouvelle vertu et c’est peut-être parce que c’est une forme très élémentaire et le fait que le tampon s’est simplement une formule comme un proverbe qui a une dimension neutre et universelle que c’est aussi pour ça que ça s’adapte toujours à des contextes et c’est toujours utilisable et renouvelable, voilà quelques questions qu’on peut essayer de développer. Par rapport au travail de Jean-Claude Mouton, que je connais mieux, je voulais dire comment le tampon s’inscrit dans son interrogation photographique, je prendrais l’exemple de toutes ces variations sur les petits amas de poussières qu’on appelle des moutons et donc il a fait de belles variations sur ce qui est un bel exemple d’une tradition qui est celle de la signature emblématique. Le travail photographique de Jean-Claude Mouton, c’est d’abord des photographies prises à Berlin pendant plusieurs années avant et après la chute du mur sur un lieu incertain, un espèce d’espace d’effacement qui est autour du mur, une série qu’il a appelé « No man’s land » et c’était des petites photographies très fragiles et très précieuses presque dans le support et dans la manière dont elles étaient présentées , précieuses au sens d’une fragilité , d’une grande subtilité dans le support et dans les couleurs et aussi dans la fragilité et donc il y a une grande correspondance entre le sujet et le médium dans cette série et il me semble que ça c’est une constante, ensuite il y a une série de photographies sur la circulation, circulation automobile, où on voit des séries de voitures des effets d’embouteillage, de saturation de l’espace et là le tampon commence à être utilisé . Encore une fois il y a entre le sujet et le tampon qui est aussi une esthétique de l’embouteillage du recouvrement de l’empattement, je trouvais ça intéressant de mettre en rapport le travail du tampon et déjà une réflexion photographique où il a toujours été question d’une interrogation très pointue sur le médium et voilà pour ce qui est de ces petites signatures emblématiques, je trouve que ces effets d’empattement, d’informe ça renvoie à une esthétique de la tache il me semble que le travail de Géréon et de Jean-Claude Mouton ce qui est assez spécifique par rapport à la tradition du tampon c’est que un des aspects c’est une esthétique de la tache. On essaiera de leur poser des questions là dessus et comment ils se situent par rapport à ça.

Gereon Inger
Je pense que les tampons ont toujours un rapport à la tache parce que les empreintes ne sont jamais propres. C’est la chose particulière du tampon, qui se situe à la frontière entre l’impression exacte et l’original. Il y a des tampons qui sont ouverts au hasard et aussi à la saleté et à ce moment là ils sont conscients d’être des tampons et c’est seulement à ce moment là qu’ils sont vraiment bons. J’ai essayé de reprendre cette saleté ou cette tache du tampon ou le fait que l’encre du tampon tache et en reprenant des taches de grands artistes hommes et femmes, puis j’ai bâti une grande collection de véritables taches de grands artistes. Ce serait ça ma question à la réponse qu’est ce qui est l’œuvre d’art, le tampon ou son empreinte, et vous avez peut-être compris que souvent ce n’est ni le tampon qui est l’œuvre d’art ni l’empreinte, mais l’œuvre d’art c’est que les gens sont en train de tamponner, mais très rarement c’est une oeuvre qui en résulte, et c’est aussi le concept de collection qui fait œuvre.

Sophie Nagiscarde
Dans ce que dit Gereon Inger, dans l’acte de tamponner il y a la tradition du tampon japonais ou zen, où il y a l’acte de tamponner, répéter l’impression, je ne suis pas spécialiste de ça mais je pense que ça se relie complètement.

Yung Hao Liu
Pour moi, il y a trois dimensions ou idées dans cette exposition de tampons.
La première est liée à la signature, la deuxième est liée à la photographie, la troisième est liée à la répétition. Dans la tradition chinoise, taiwanaise, asiatique on utilise souvent le tampon en tant que signature, au moment de signer. En France, dans le monde occidental, la signature est illisible, c’est un geste de répétition. La signature est là juste pour signifier un acte. En Asie le tampon remplace la signature, tamponner c’est signer, c’est souvent lisible et propre, c’est un signe qui remplace la signature, et est aussi un engagement législatif.
Je me demande comment on peut signer une image en forme de tampon, c’est ma question, et peut-être que la réponse viendra plus tard. La deuxième dimension dont je veux parler, c’est la photographie. Dans l’esthétique de la photographie, il a y toujours des nuances et quand dans les images passent en tampon, il n’y a plus de nuance. Ca devient une image très contrastée de noir et blanc. L’esthétique photographique (Roland Barthes), une image cadavre, c’est donc quelque chose de déjà mort esthétiquement. L’image photographique est arrêtée et est déjà passée, s’est quelque chose de posé devant l’objectif. Dans l’esthétique du tampon c’est quelque chose qui est à venir, on prend un tampon et on va tamponner. La photographie c’est quelque chose de passé alors que le tampon appel à la participation.
(Si on prend la dimension esthétique de l’écriture en Asie et en Europe, répétition de l’esthétique de photographie, tampon esthétique s’est quelque chose de problématique très contrasté, il y a plusieurs choses , c’est possible, on peut le faire,)
La troisième dimension c’est la répétition. La signature peut être répétée, le tampon à pour action de tamponner, gestes illimités, sans fin, donc comment on peut répéter le tampon dans l’acte de création, c’est une répétition, et pour Maurice Blanchot c’est une répétition, on ne répète pas la même chose, il y a répétition dans la différence, c’est là qu’il y a le sens de répétition. Pour Géréon, il y a répétition de sens, chaque objet est un souvenir, on trouve la même trace du souvenir, derrière ce petit objet il y a des sens différents, répétitions et profusions de sens différents.

Michel Weemans (en parlant de des tampons de Gereon Inger)
Les taches d’artistes, c’est comme des signatures ?

Gereon Inger
Il y en a quelques uns seulement qui sont des signatures. Il y a des artistes qui signent en laissant des taches et a ce moment je vais les citer, je les intègre dans le travail

Yung Hao Liu
comment on peut signer une image ?

Gereon Inger
avec un tampon ?

Yung Hao Liu
Oui, avec ton tampon, avec tes idées

Gereon Inger
Je signe mes images avec ma signature mais j’ai un tampon de ma signature

Michel Weemans
Les tampons asiatiques sont utilisés comme une signature.

Yung Hao Liu
Oui.

Sophie Nagiscarde
Ce à quoi je faisais allusion tout à l’heure, c’est quelque chose de spécifiquement japonais, ce sont ces carnets de bouddhisme zen
Le bouddhisme zen est très intéressant par rapport aux tampons et à l’acte de tamponner. Ils remplissent des carnets pour s’élever. Plus tu tamponnes, plus tu remplis ces carnets (exposition au grands palais sur les mandaras) ce qui est important c’est de le remplir comme un carnets de prière et en tamponnant tu es censé par la prière t’élever et rentrer dans un espèce de vide intellectuel, propre à la plupart des philosophies asiatiques, et je trouve que par rapport à ce qu’il a dit, ici c’est religieux, c’est un rite de méditation, il disait que l’œuvre c’est l’acte de tamponner et là en l’occurrence le rite c’est de tamponner.

Intervention d’un monsieur dans la salle
Ce sont des livres que l’on appelle des cchounicho , des carnets de pèlerinage et on fait mettre un tampon dans chaque temple qu’on a visité et c’est une coutume qui est tellement profonde au japon on trouve même ça d’un point de vue laïque dans toutes les gares. Il y a des tampons en caoutchouc de la ville et on peut les mettre sur des carnets, c’est passé du domaine religieux au domaine … Mais effectivement l’art, l’imprimerie a commencé probablement à cause du bouddhisme ,et est très lié à la pensée bouddhique, car les premières impressions qu’on a , se sont des prières et des images bouddhiques , le bouddhisme e à cette idée de la reproduction infinie, de la répétition infinie.

Michel Weemans
C’est vraiment l’administration divine !

Sophie Nagiscarde
Pour moi, c’est gênant de parler du tampon de manière administrative. Le tampon, pour moi, c’est une technique, le tampon est arrivé, a existé avec le saut.

Michel Weemans
Le tampon c’est aussi un contrôle un peu autoritaire.

Sophie Nagiscarde
Le tampon, ce n’est pas que ça, c’est aussi quelque chose de commercial, et il y a d’autres aspects dans le tampon, et de toute façon de l’administratif on en a besoin, il ne faut pas voir ça forcément comme une chose négative. Le fait qu’on me dise que le tampon administratif c’est sévère, c’est négatif et Fluxus s’en est moqué en jouant à la postière ou en tamponnant, mais en même tant c’est une réalité qui existe et qu’on ne peut pas évacuer comme ça en disant c’est administratif. Il y a des artistes qui ont fait des tampons administratifs. Si on s’intéresse juste au motif par exemple, on peut en trouver dans les tampons du Bauhaus, qu’on retrouve dans le catalogue Tampons, et il y en a plein d’autres je pense de ce genre là.

Michel Weemans
L’expression de l’esthétique administrative qu’utilise B. Buclot pour l’art conceptuel ça renvoi à une esthétique administrative, une forme d’appréciation esthétique

Sophie Nagiscarde
Les administrations sont constitués d’entités humaines très variées
Intervention d’une femme dans la salle
C’est le rôle du tampon de supprimer l’entité humaine. Dans le travail d’Andy Warhol, il n’y a plus d’entité humaine, tout le monde peut prendre son tampon et signer.

Sophie Nagiscarde
Voire le tampon uniquement de ce biais là me dérange un peu.
Les tampons de tissus imprimés indiens ne me semblent pas avoir ce même genre de background idéologique derrière

Intervention d’une femme dans la salle
Je ne suis pas du tout idéologique, je dis juste, un tampon, quelque soit la main, il n’y a plus il n’y a plus la main

Jean-Claude Mouton
Chaque coup de tampon est différent, ça bave, on peut tamponner deux fois , les couleurs se mélangent, il y a un enrichissement des images, des taches.

Intervention d’un monsieur dans la salle
Le tampon c’est un outil, c’est en ce sens que la main exprime quelque chose à travers l’outil, malgré tout, même s’il est primitif.

Intervention d’Antoine Moreau
Quand on dit faire tampon, ça montre bien la prise de distance.

Sophie Nagiscarde
Je pense que là on fait référence aux tampons de wagons de train

Julie Heintz
Qui sont quand même entre, et c’est une mince pellicule, mais pas dans le même sens, c’est vrai.

Gereon Inger
Le mot allemand pour tampon c’est ……., ça vient de envoyer, taper du pied.

Julie Heintz
Envoyer un coup, c’est aussi une libération d’énergie, c’est très violent, d’un seul coup, un peu comme un marteau pilon, une grande énergie sur un point très petit à un moment donné.

Gereon Inger
Ca vient du temps ou le tampon était en métal. Mais il ne faut pas marteler les tampons, jamais !

Michel Weemans
Pour que tout le monde soit d’accord, il faut aussi préciser que c’est un paradoxe foncier comme pour l’action de la reproduction. C’est pour cela que le thème du débat est reproductibilité et irréproductibilité car il y a toujours deux faces d’une même médaille. Pour le tampon, il y a, à la fois, un caractère de répétition et de différence, d’unicité et un caractère de multiplicité. Je crois que les artistes ont beaucoup joué de ça, par exemple quand Beuys fait des tampons qui remplace une signature, à mon avis, il est tout a fait conscient, comme l’était Duchamp, du fait qu’il est en train de produire une reproduction unique, ou un original reproductible, parce que ça va être réinvesti de valeur marchande, d’unicité, même si dans le principe c’est reproductible.

Julie Heintz
Après avoir réfléchi sur la question du tampon chez Beuys, on ne trouve pas tellement de tampon chez lui. C’est intéressant parce que, au fond, le premier tampon qu’on voit apparaître, c’est un tampon qui est lié à la création du parti étudiant allemand, en 1967, c’est relativement tardif dans ce qu’il a fait et par rapport à son histoire Fluxus. C’est très tard même par rapport à Fluxus, d’ailleurs je crois que ce n’est même pas dans le cadre de Fluxus que ça l’intéresse. Pour lui, c’est vraiment un organe de liaison, c’est quelque chose qui lui permet de circuler entre les gens, qui signe. Beuys se démultiplie et le tampon c’est une des formes de démultiplication de Beuys et je trouve que ça rejoint plutôt une idée plus générale chez Beuys qui est celle de véhicule. En fait, il a crée le tampon et surtout les multiples , c’est un des multiples multiple de Beuys que le tampon. Je pense qu’il joue un rôle par rapport à l’écriture, il dit des choses à travers ça, il y a des phrases comme par exemple « mouvement pour le vote du peuple », « mouvement des étudiants allemands », etc, Ce sont des choses qui sont très directes et même directives et je pense que le tampon chez Beuys n’a pas de fonction tampon en réalité, sauf que de temps en temps, il utilise ses tampons à des endroits précis. Par exemple, il va tamponner une carte, comme Beuys utilise beaucoup la carte postale comme outil. Sur les cartes postales, il va désigner une certain nombre de points, par exemple, il va mettre un tampon sur la gorge ou sur le creux du bras ou sur le genou, qui sont des éléments de son propre corps, qu’il met à chaque fois en jeu, En fait, le tampon est un élément de liaison , il est aussi un élément de signature mais il ne fini pas une œuvre, il désigne quelque chose, il revoit à un processus qui est en train de se faire et ce qu’il appelle aussi « les processus parallèles » ou « dédoublement ». Il y a un tampon qui est très important chez Beuys, c’est celui qui s’appelle A…Straum qui veut dire « courant principal », « courant essentiel » et peut-être «courant fondamental », et l’idée de AS … est mis entre deux fois des guillemets et ces guillemets montrent que c’est déjà une citation du mouvement. Ce n’est pas le mouvement, ce n’est pas l’incarnation, ce n’est pas la signature du mouvement, c’est quelque chose qui est à l’œuvre, c’est le processus qui est à l’œuvre qu’il re désigne et qu’il re multiplie par le tampon au-delà de l’action qui a été déjà faite. Au fond, le tampon est un relais, le tampon n’est pas un arrêt, c’est vraiment un relais du travail il indique que le travail est en cours. C’est une dimension du tampon, chez Beuys, qui est assez importante, qui explique aussi pourquoi elle n’a pas cette dimension que les gens de Fluxus lui donnait. Il n‘ y a pas de dimension ludique, par exemple, chez Beuys. Il ne va pas se révolter contre l’administration, lui il va plutôt créer le parti des étudiants allemands pour réagir contre l’administration bête qui fait que, par exemple, les écoles d’art se contentent de transmettre de façon académique, puisque se sont des académies, les grands principes de l’art et former des artistes socialement et totalement inutiles. Ce n’est pas par le tampon, c’est par la création d’un parti politique, par la création du parti des étudiants que ça va se passer et le tampon n’est qu’un petit relais de ça, ça ne joue pas un très grand rôle je pense. Mais, par contre, c’est vrai que le tampon est un des multiples, un des véhicules, « véhicule art », que Beuys a développé. C’est à dire, qu’effectivement les idées ne se transportent pas comme ça, elles ont besoin de supports, et un des supports de la multiplication c’est, justement, le tampon, et ça c’est vraiment très important chez lui.

Sophie Nagiscarde
On peut citer également Vostel dont le tampon était l’objet principal du travail.

Julie Heintz
Vostel appelait ça « des tampons idées », et effectivement c’était des tampons, mais il n’était pas le seul non plus à le pratiquer, où on mettait des phrases assez virulentes, assez fortes. Un exemple de tampon de Vostel « je déclare que la paix est la plus grande œuvre d’art qui soit ». Ce sont des tampons idées, des tampons concepts, des affirmations qui ont des assertions, qui sont définitives et très fortes, et qui forment programme. L’exemple cité est une réaction à la phrase de Beuys qui disait que tout homme est un artiste. Ici ce n’est pas l’homme, c’est la paix qui est la plus grande œuvre d’art. Ceci dit, il y a eu une inflation, une augmentation parmi les artistes allemands et le tampon était certainement le mode de circulation le plus rapide des réactions des artistes les uns aux autres. Au fond on se demande pourquoi on n’est pas resté à l’écriture. C’est l’époque aussi des talsibahaus, de l’écriture directe, immédiate, sur les murs, publicité des idées, etc. On peut se demander pourquoi l’écriture n’est pas resté première et pourquoi il y a eut une re multiplication des affirmations. Il est vrai que c’est la forme d’édition la plus rapide et la moins chère.

Sophie Nagiscarde
C’est aussi l’aspect esthétique, l’esthétique qu’il y avait à cette époque là. Ca permet d’utiliser du rouge, du noir. Si on prend l’affiche de ces années là, 1960 1950, c’est du rouge et du noir avec le tampon.

Julie Heintz
Et ce côté je dégueule la peinture, le « pas propre ». C’est la peinture qui bave et c’est tout le contraire de la maîtrise. C’est aussi parce que c’est un espace de liberté et c’est pas seulement un espace de dérèglement, c’est un espace d’élargissement de ce qu’est le champ de la peinture, le champ de la parole, le champ de la poésie, de l’édition, de la diffusion, etc. Il y a l’irrégularité, le débordement, et puis il y a le geste qui est très important. C’est effectivement comme les tampons du chemin de fer, c’est un grand coup qui est donné. C’est énergique. Il y a une présence physique qui n’est pas le côté tripale de la peinture mais qui est l’énergie qui est, comme ça, donné sur un point.

Sophie Nagiscarde
Il faut différencier plusieurs sortes d’artistes. Il y a des artistes qui ont utilisé le tampon parce que ça a été un médium parmi d’autre dont ils se sont servis, et puis il y a des expériences de galerie comme Stalpelplast, des endroits comme ça qui sont des gens, comme par exemple Gereon Inger et Jean-Claude Mouton, qui ont travaillé sur le tampon et qui vont beaucoup plus loin dans l’idée perceptible du tampon, c’est à dire qu’ils vont se poser les questions qu’on se pose aujourd’hui, mais ce n’est pas le fait de tous les artistes.

Miche Weemans
Pour une majorité d’artistes c’est vraiment très ponctuel parce que ça correspond à quelques questions. Parfois le tampon c’est vraiment un objet qui est vraiment adéquat à un questionnement artistique, à une démarche, alors les artistes l’utilisent de manière continue.

Julie Heintz
On peut se demander s’ils ne s’inscrivent pas volontairement dans une continuation par le détournement de l’histoire de l’art. Le tampon, au fond, c’est quand même le prolongement du collage.

Sophie Nagiscarde
Je ne pense pas, c’est plutôt l’empreinte.

Julie Heintz
Oui, c’est l’empreinte

Sophie Nagiscarde
C’est la trace, c’est la main, pour moi c’est ça.

Julie Heintz
Oui c’est ça aussi, mais je ne pense pas que ce soit contradictoire.
Dans le cadre de Fluxus, le moment historique de l’apparition du tampon Fluxus, c’est le moment des actions, c’est le moment où le geste, la présence permanente du corps est vraiment au premier rang et du coup le tampon s’inscrit dans ce mouvement là, qui est celui de l’action.

Michel Weemans
Par rapport aux deux artistes présents, il y a quelque chose qui est particuliers. Il y a une esthétique du tampon, de la tache, de la trace , de l’empreinte, avec des effets de brouillage, de saturation d’images. Jean-Claude, dans ton travail photo, comment ça évolue ? Les tampons qui transposent des images photos, qui transforment une image qui peut être au départ est nette en quelque chose de beaucoup plus graphique, avec des effets propres. Est-ce quelque chose qui est très intentionnel, qui a évolué, peut-être?

Jean-Claude Mouton
Les dernières photographies que j’ai faite sont photos floues prises par la fenêtre d’un train. Elles étaient au départ un peu brouillée, et après quand on les utilise comme tampon, ça va encore plus dans ce sens.

Michel Weemans
Le tampon prolonge une interrogation qui est déjà à l’œuvre.

Jean-Claude Mouton
Ce qui m’intéressait dans le tampon c’est que c’est d’abord un procédé photographique. Je l’ai donc trouvé complètement cohérent avec mon travail photographique. La photographie est une empreinte de lumière et là ça devient une empreinte. Ca m’intéressait beaucoup. Il y a cet aspect multiplication, chaque fois identique en théorie mais en fait, dans les faits, chaque fois différent, parce qu’effectivement ça bave. C’est un contre point d’un autre travail que j’ai mené ces dix dernières années, qui est un travail à Berlin, un autre détournement de technique. Ce sont des ektachromes surexposées qui donnent des couleurs très légères, très disparaissantes, et qui sont quasiment irreproductibles. J’ai joué le jeu de la bavure et de la reproduction comme variation et comme mauvaise reproduction. Ce qui m’intéressait dans le tampon c’est que s’est une mauvaise reproduction par rapport aux photographies. Pour arriver au tampon, il faut l’appauvrir, c’est un squelette de photographie. Ensuite, ce qui m’intéressait c’est cet appauvrissement et quand c’est utilisé, quand c’est tamponné, il y a à nouveau un enrichissement par les bavures, les couleurs qui se mélangent, les variations etc.

Sophie Nagiscarde
Il doit y avoir une transformation, parce que passer d’une photo floue à un tampon. C’est une drôle d’idée de partir d’une image floue car le tampon c’est justement quelque chose de très net.

Jean-Claude Mouton
Pour passer d’une photo floue à un tampon, il faut rendre nette une photo floue, des formes floues qui sont des filets, des flous de filets

Michel Weemans
Des squelettes de flous

Julie Heintz
Des flous immobilisés

Gereon Inger
Je me situe dans une tradition qui cultive le flou et la tache, et la mauvaise reproduction. Par exemple Warhol et Polke avec le tramage. D’ailleurs, ils ont tous aimé la mauvaise reproduction, dans la journaux, et maintenant ils donnent ça directement aux gens pour qu’ils fassent, eux-même, leur belles ou mauvaises reproduction.

Intervention de Marie-Christisne
Par rapport à ces notions de reproduction, est-ce qu’on peut transférer les technologies, la « pensée » du tampon sur les problèmes d’écriture sur Internet ?

Jean-Claude Mouton
Je ne sais pas si on peut dire directement transféré

Gereon Inger
Le parallèle entre le tampon et Internet c’est la disponibilité des images et la différence c’est que sur l’écran, les images ne sont que virtuelles, numérisées, lumières tandis que le tampon donne de la matière.

Jean-Claude Mouton
Sur Internet les images ne bavent pas tellement, elles sont éventuellement pixelisées.

Intervention d’Antoine Moreau
Il est possible de les imprimer.

Intervention de Marie-Christisne
Il y a beaucoup de travail là dessus. Des taches donnent lieu aujourd’hui à des créations numériques, tous les dessins animés qui sont repris, toutes les déformations possibles qu’on peut faire d’une image, il y a de la création numérique qui se fait avec donc dans la question du transfert on pouvait trouver des approches intéressantes.

Jean-Claude Mouton
Ce n’est pas propre à Internet mais propre à l’ordinateur. L’ordinateur et le tampon sont un peu cousin. Dans beaucoup d’administration, les ordinateurs ont pris la relève des tampons.

Sophie Nagiscarde
Par rapport au tampon, ce qui a fait du mal au tampon avec l’arrivée d’internet c’est que le mail art , les artistes qui correspondaient par la poste, qui s’envoyaient des tampons maintenant ils s’écrivent par e-mail.

Michel Weemans
Ce qui apparaît plus ici dans l’usage du tampon c’est une esthétique de la tache.

Julie Heintz
C’est comme même matériel, il y a la présence de papier, de l’encre, la présence à la limite du geste, parce que ça déborde, parce qu’il y a des petites taches autour.

Sophie Nagiscarde
Le tampon c’est aléatoire, alors qu’avec l’ordinateur c’est plus difficile. L’impression au tampon reste proche des techniques anciennes.

Intervention d’un monsieur dans la salle
Et comment signe-t-on sur Internet ? Il y a un autre aspect dont parlait Yung Hao Liu, pour les orientaux, le tampon c’est le cachet. Nous, nous voyons des tampons qui bavent, mais il faut savoir que le tampon extrême oriental est souvent fait dans du jade et est très précis. Au Japon on l’utilise encore comme signature, et on pense que c’est plus fiable qu’une signature car c’est très difficilement imitable. La gravure est extrêmement précise. C’est aussi quelque chose qui identifie un individu très précisément contrairement à l’aspect de reproduction du tampon . Yung Hao Liu disait que le tampon c’est le passage entre la vie privé et le monde public,et il n’y a pas cette notion d’administration comme on a chez nous.

Michel Weemans
Est ce que l’exemple ne serait pas une empreinte digitale en tampon, en tout cas ça identifie un individu de façon unique.

Julie Heintz
Il y a une vrai différence entre l’orient et l’occident, le passage de la vie privée à la vie publique, le soucis d’avoir quelque chose de très propre, et à la limite d’infalsifiable, c’est exactement le contraire de ce qui c’est passé avec Fluxus par exemple. Ici, au contraire, on multiplie à l’infini, on déborde, c’est aussi la forme de critique, alors que dans le tampon asiatique, il n’y a pas de critique.

Intervention d’un monsieur dans la salle
Apparemment, Beuys utilise le tampon comme un passage.

Intervention de Marie-Christine
Il y a aussi une création d’identité, création du parti.

Julie Heintz
Beuys ne s’est pas posé la question du tampon, il s’est vraiment posé la question du multiple et c’est un des multiples possible. Je pense que s’il avait réfléchi un peu à la question du tampon, il l’aurait fait autrement.

Sophie Nagiscarde
Le tampon Fluxus c’est aussi l’objet qui fait parti d’un set, des boites. Par exemple, YOKO Uno avait fait une sublime boite avec à l’intérieure des petites cartes avec un petit tampon, de petits pas d’oiseaux, de petites chaussures de femmes, des petits poèmes. Dans Fluxus, il n’y a pas que le tampon, il y a aussi ce qui va derrière, le multiple est constitué d’un set dans lequel il y a les faux timbres,…

Julie Heintz
Les boites Fluxus ont tout un tas de chose différentes à l’intérieur. Il y a aussi ce côté, avec la boîte de Gereon Inger, c’est que c’est un jeu de cubes. Le ludique passe aussi par la manipulation, et peut-être aussi par des souvenirs d’enfance pas si lointain en réalité. Chez Jean-Claude Mouton, il y a aussi les gros cubes qu’il donne à l’image du 6X6 photographique. En réalité, il y a un jeu de manipulation, je prends dans la main quelque chose de très « touché » qui est important.

Sophie Nagiscarde
Ca oblige, aussi, à entrer dans la démarche conceptuelle. Si on achète le kit pour faire une action Fluxus, si on veut s’en servir, on fait aussi une action Fluxus.

Julie Heintz
Dans le tampon Fluxus, il y a un prolongement par l’action Fluxus, il y a une action Fluxus qui est un tamponnage conceptuel et qui n’a pas non plus de matérialité, on est au delà du tamponnage matériel. C’est à dire qu’on reproduit l’action Fluxus, on reproduit un événement, un geste, une situation etc, On est bien au delà simplement de la matérialité du tampon.

Gereon Inger
Il y a un parallèle entre les tampons de Beuys et les tampons ou cachets chinois. Quand Beuys tamponne avec son tampon ashtrom, il fait fonction de signature, et donc à ce moment là c’est original aussi.

Michel Weemans
Il fait office de signature

Julie Heintz
Il donne de la valeur, il fait office de signature.

Michel Weemans
Même si ce n’est pas écrit Beuys

Sophie Nagiscarde
A côté de ça, il y a Spoerri, qui fait un tampon « ceci n’est pas une œuvre d’art »

Julie Heintz
Avec Warhol et Beuys, on a le tampon et la signature à côté, ça c’est un principe de l’édition. On est quand même dans les grandes traditions de l’estampe, de la reproduction des tirages limités. Ici c’est illimité mais on peut avoir des tirages limités à partir du moment où on peut avoir une signature à côté. Je trouve que le tampon pose au moins cette question qui est en fait, s’il se sépare de la tradition au moins de l’estampe, de la reproduction mécanique, des images avec leur problème d’insertion avec dans le domaine artistique, est ce qu’ils à la limite, sont totalement intégrés, etc, mais en tout cas c’est vrai que la signature à l’avantage ici de rappeler qu’on est dans le cadre d’une œuvre d’art, alors que l’absence de signature et le côté répétition à l’infini et même vente de l’objet de la signature qu’est le tampon a le mérite en tout cas de la rendre re multipliable à l’infini. On sort aussi de ce côté limité de l’œuvre d’art unique ou bien multipliable dans un certain nombre donné, on sort de la maîtrise.

Intervention d’une femme dans la salle
Comment les japonais peuvent considérés qu’un tampon soit infalsifiable ? Y a t-il quelque chose qui empêche de faire deux tampons en jade identique ?

Yung Hao Liu
C’est très difficile, parce qu‘ on creuse l’écriture sur un petit tampon, c’est impossible de reproduire la même chose.

Intervention d’une femme dans la salle
A cause de ses défauts, de ses détails ?

Yung Hao Liu
Oui

Gereon Inger
Pour reconnaître un cachet ou tampon original, les administrations font entrer des petits défauts pour qu’ils soient infalsifiables.

Jean-Claude Mouton
Pour revenir à quelque chose d’administratif, les cartes d’identité, qu’on nous promet être infalsifiable, n’ont plus de tampons.

Intervention de Marie-Christine
On est passé d’une ère du tampon qui définie l’identité, identité culturelle, identité artistique éventuellement, de l’auteur, à l’acte de tamponner, à une ère, avec la nouvelle carte d’identité, où ce qui va faire l’identité, va être produit par quoi ? S’il n’y a plus la pression du tampon, il y a un acte important qui manque.

Sophie Nagiscarde
Par l’empreinte, par l’œil, par le trait physique

Jean-Claude Mouton
Sur les nouvelles cartes d’identités, il n’y a ni empreinte de doigts, ni tampon, il y a juste la photo peu ressemblante.

Sophie Nagiscarde
Sur le passeport il y a des tampons.

Intervention d’une femme dans la salle
il y a un article dans libé de cette semaine sur la Russie, et en Russie les gens ont un passeport et un tampons et s’ils n’ont pas ce tampon, il ne peuvent pas trouver du travail, ils ne peuvent rien faire , c’est très grave de ne pas avoir ce tampon, même si les lois contredisent ça.

Julie Heintz
On a toujours parlé des tampons encré mais est ce que le tampon sec à le même statut ? (tampon qui enfonce le papier, qui le gaufre)

Sophie Nagiscarde
C’est un peu moins utilisé car il faut un papier spécial.

Julie Heintz
Au tribunal, par exemple, c’est souvent des tampons secs.

Gereon Inger
Aux Etats-Unis, toutes les entreprises doivent avoir un tampon sec, c’est une tradition.

Julie Heintz
Il me semble que le tampon sec est absent dans le domaine artistique, et il a le même rôle que le tampon avec encre sur le plan administratif.

Jean-Claude Mouton
Celui-là il ne bave pas.

Julie Heintz
Non mais il déchire, il enfonce.

Intervention d’un monsieur dans la salle
Est ce que vous avez toujours choisi d’exposer de cette manière ou y a t-il eu une évolution dans la façon d’organiser une exposition de tampons ?

Jean-Claude Mouton
Pour moi c’est un peu toujours de la même façon et ce qui est important c’est que le public participe et utilise les tampons.

Intervention d’un monsieur dans la salle
On aurait pu imaginer une exposition avec des tampons accrochés sur le mur, mais apparemment, le spectateur est important.

Jean-Claude Mouton
Les tampons ce n’est pas l’œuvre mais c’est le fait que le public tamponne.

Gereon Inger
C’est un processus qui s’est développé, mais il y a toujours eu le parallèle avec la peinture, que j’ai montré en même temps. L’utilisation par les visiteurs est très importante. Maintenant, je fais aussi des actions, je me promène seul en ville et je tamponne, et je fais de la documentation de ça.

Intervention de Marie-Christine
Est-ce que c’est du tag ou de la documentation ?

Gereon Inger
De la documentation

Julie Heintz
Pour cette expo, il a ramené des objets et Jean-Claude a fait des photos.

Jean-Claude Mouton
Il y avait deux mouvements. Il a tamponné des choses dans la rue qui sont restées sur place et que j’ai photographié et il a ramené des choses qu’il a tamponnées et qui sont présentes à l’exposition.

Gereon Inger
J’ai voulu montrer quelque chose « souvenir oublié », « souvenir oublie », de façon poétique j’ai essayé de tamponner des objets dans la ville de façon à ce que cela exprime quelque chose sur l’oubli, sur ce que c’est qu’oublier. J’ai ramassé des objets dans le caniveau et je les ai mis dans une boite puis je les ai déposés ici, et je les ai tamponnés avec le mot souvenir, la date et l’heure.

Intervention de Marie-Christine
Est-ce que ça a à voir avec la suppression du mur de Berlin? Le mur de Berlin avait presque une fonction de mur de mémoire. La suppression de cet espace là est énorme car c’était un endroit où on pouvait venir écrire « j’étais là à tel jour tel heure », » j’ai rencontré mon ami à tel moment »

Gereon Inger
Ca a à voir avec le contraire. La vraie question c’est l’oubli. Mais au fond c’est ambivalent parce que j’ai oublié des objets sur les quels le tampon « oublier » se trouve et peut-être que quelqu’un est en train de trouver pour s’en souvenir. Je m’étais tamponner le mot oublier sur le front, et d’ailleurs on m’a trouvé plusieurs fois !

Visite guidée sur le site Internet de Géréon et présentation d’un livre de …

Gereon Inger
Je vais ajouter la home page la performance d’hier et d’aujourd’hui. Tous les tampons présents à l’expo sont également représentés sur le site. Internet c’est pratique pour comprendre le devenir de ces tampons, par exemple sur un tampon se trouve des oiseaux qui se trouvent être ceux du Tableau de Bosch intitulé le jardin des délices.
On trouve également les taches des artistes qui sur les tampons.
On trouve les artistes qui se sont servis des tampons par exemple le livre de …. il a fait une édition des livres sur les tampons, et tout le livre a été fait avec les tampons qui sont représentés sur le site. Lui aussi a une théorie ou poésie du tampon. Ces tampons peuvent signifier ou peuvent être un vocabulaire visuel pour déverser de par le monde afin que le monde tienne à peu près ou fasse impression ou ça peut être un alphabet pour le déverser de par la langue, par-dessus son propre vocabulaire ou les tampons peuvent être tout pour signifier des choses entre ennui et peur agréable et ils ne peuvent pas être signe ou rien du tout (consultation du livre sous verre) il y a la description de tous les tampons qu’il y a dans la boîte, toutes les associations qui vont avec le tampon sont listées ensuite ils sont tous utilisés, liés à une histoire assez sauvage et saugrenue, où il faut sauter des pages pour pouvoir suivre l’histoire, toutes ses empreintes qui bavent, ne sont pas propres, l’auteur est un des tamponneurs les plus intenses de l’histoire de l’art, et à la fin il y a les pages où il nettoie les tampons, la fin c’est chaos et saleté.

Julie Heintz
Pourquoi n’a t-il pas tamponné directement dans le livre et pourquoi est-il passé par l’impression ?

Gereon Inger
C’est le tome seize de ses œuvres complètes, et son œuvre doit avoir 40 ou 50 tomes, ça été vendu à toutes les bibliothèques, les galeries, c’est impossible de faire un tel livre en tamponnant à la main.

Julie Heintz
En fait, on sort du livre d’artiste.

Gereon Inger
Première impression, 1000 exemplaires, dont 100 exemplaires avec couvertures originales, numérotés et signés en 1975.

Julie Heintz
Ne penses-tu pas que ça pose, quelque part la question du statut de l’œuvre d’art. Comment se pose la question de l’auteur, la place du spectateur ? Pourquoi passer par la reproduction mécanique ? A 1000 exemplaires il pouvait continuer, s’amuser, pas avec la même qualité, bien sûr.

Sophie Nagiscarde
On reproduit bien la photo, la peinture, alors pourquoi pas le tampon. Sinon, ça peut poser un problème majeur à la diffusion de l’information.

Julie Heintz
Ce n’est pas non plus une technique de reproduction. Je pense à Victor ?? Il aurait pu faire plein de livres différents (il aurait pu, il aurait pu…)

Gereon Inger
… Son travail ce n’est pas tellement faire de l’original mais faire des livres. Il ne s’est pas vraiment soucier de la question de l’œuvre original dans ses publications, mais chaque œuvre originale a été vendue dans des galeries, pièce unique.